15 juillet 2008 | Photo inédite du poète Alexandre Guinger
Photo inédite du poète Alexandre Samsonovitch Guinger (1897- Saint-Pétersbourg - 26 août 1965 Paris)
Alexandre Guinger appartient à la seconde génération des poètes de la première émigration russe, il arrive probablement en 1921 à Paris. Dès 1922 il entre dans le groupement poétique « La chambre des poètes » auquel appartient déjà Dovid Knut, il y publie la même année son premier recueil de poèmes.
A partir de 1926 il publie régulièrement dans la célèbre revue d’art et littérature de l’émigration russe « Tchisla ». Entre 1930 et 1940 il organise chez lui tous les mercredi des soirées littéraires auquelles participent de nombreux poètes, écrivains et peintres de l’émigration.
Pendant l’occupation nazie Alexandre Guinger qui est juif, reste à Paris avec sa femme Anna Prismanova. Malgré les dangers il affirme croire au destin. Cette conviction est renforcée par quatre arrestations manquées. Alexandre Guinger était à chaque fois absent de chez lui.
"Février 1944
Je voulais me coucher, à onze heures et demie du soir, quand j'entendis quelqu'un frapper doucement à la porte. C'était Alexandre Guinger, poète et époux d'Anna Prismanova. Je le fis entrer. Il me raconta qu'il restait terré chez lui et ne sortait qu'une fois par semaine, à la tombée de la nuit, pour se donner de l'exercice. Il est persuadé que, dans son immeuble, personne ne le dénoncera. Sa femme passe pour une "Aryenne" ainsi que leur fils. Je suis très inquiète, mais il reste serein et m'assure qu'il ne craint rien.
- Je suis protégé par sainte Thérèse.
Je me suis fâchée.
- Ni sainte Thérèse ni aucune autre sainte n'a encore sauvé personne. Il suffirait d'une rafle dans votre rue et vous êtes fichu.
Mais il est tout à fait convaincu qu'il s'en tirera. Nous nous serrons dans les bras en nous quittant.
Nina Berberova - C'est moi qui souligne Actes Sud "
En 1946 il prend, ainsi que d’autres émigrés russes, la nationalité soviétique et collabore à l’ « Union des Patriotes Soviétiques ». Il travaille en tant que correcteur au journal « Les nouvelles russes ».
Alexandre Guinger se passionnait pour l’indouisme et le bouddhisme, il appartenait à une communauté bouddhiste à Paris. Sa poésie se caractérise par un détachement des souffrances terrestres, de la solitude, de l’absence de réponse à ses appels. Ses poésies pourraient être des prières ou des appels à la prière. Alexandre Guinger appelle à être heureux de chaque nouvelle journée, à être conscient de l’approche de la mort.
L’écrivain Gazdanov, qui l’a connu pendant près de 40 ans le définit comme une personne inhabituelle dans sa façon d’être, de s’habiller, de parler. C’était un grand connaisseur de la poèsie russe et française. Il était sévère avec ses écrits et ne publiait qu’un petit nombre de ses poèmes.
Sources : Dictionnaire encyclopédique de la littérature russe Wolfgang Kasack
L'émigration russe en France 1919-2000 Lev Mnoukhine, Marie Avril, Véronique Lossky
« Nous passons nos soirées dans un café de Montparnasse, le plus souvent à la Rotonde. On y retrouve Boris Poplavski, Alexandre Guinger, Anton Ladinski, Mikhaïl Alexandrovitch Struve, Georges Adamovitch et, quelques années plus tard, Vladimir Smolensky, Youri Felzen, Youri Mandelstam, Georges Fetodov et, plus rarement, Vladimir Weidlé, Boris Zaïtsev et d’autres (…) Nous n’avions pas de vie quotidienne bien réglée et n’en voulions pas. J’éprouvais le sentiment d´être libre et liée ; libre parce que je vivais en Occident, j’étais jeune, je lisais de livres, rencontrais des gens, mûrissais et écrivais ».
Nina Berberova (1989) C’est moi qui souligne. Ed. Babel
20:25 Publié dans Poètes de l'émigration russe | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : russie, culture, littérature, alexandre guinger | Facebook